Introduction : Les mots et le dico
Petite stat' du jour bonjour : la plupart des Français utilisent entre 3000 et 5000 mots.
Et encore, au quotidien, on en utilise qu'environ 500 pour le langage courant.
Dans le cadre de la prise de parole ou de l’éloquence, ce chiffre montre l'importance de diversifier son langage.
Pour info, il y a 60 000 entrées dans le Petit Robert et le vocabulaire de Maupassant a été évalué à environ 12 000 mots... Sacré Guy.
Conclusion : on a une langue riche, très riche.
Et peu de gens, trop peu de gens, jouent avec cette diversité.
À la limite, qu'on ne trouve pas de synonymes pour remplacer le mot "panache" ce n'est pas très grave, il se suffit à lui-même :)
Or très souvent, le choix des mots a non seulement un impact sur le style, mais aussi sur l'image et la perception qu'on en a.
Dans toute prise de parole, les mots que tu choisis agissent comme des leviers puissants pour capter l’attention, transmettre des idées, et renforcer ton éloquence.
Par exemple, on dit un "SDF" plutôt qu'un "clochard".
C'est un euphémisme pour rendre la chose moins brutale.
Ou alors on dit "plan social" plutôt que "plan de licenciement".
C'est un euphémisme pour mieux faire passer la pilule.
Car dans un "plan social" on met en lumière les mesures "sociales" qui accompagnent les licenciements.
On ne parle donc plus des licenciements.
On ne parle donc plus des gens qui sont virés.
Ces choix ne sont pas anodins, surtout dans le contexte de la rhétorique et de l'impact politique des mots:
Les mots ont un sens, une valeur, une couleur, un poids.
Imagine que je vous invite tous à venir manger à la maison, mais avec 3 formulations différentes :
"Je vous invite chez moi pour se faire une bonne bouffe"
Ça sent les plats en sauce, le supplément fromage et le bouton du jean's desserré à la fin du repas.
> Sous-titre : on va se péter la panse.
"Je vous invite chez moi pour se faire un petit dîner"
Ça sent la bouteille de Petrus, au moins 1 bougie allumée, des couverts de la même famille et de la salade en entrée.
> Sous-titre : on va se faire plaisir avec des produits fins et raffinés.
"Je vous invite chez moi, grignoter 2-3 trucs"
Ça sent l'apéro, le tarama de la veille et le reste de quiche du midi.
> Sous-titre : mieux vaut avoir mangé avant, on est surtout là pour se voir.
En fonction de la qualité du repas, je vais privilégier certains mots au moment de lancer mon invitation. Maîtriser ton éloquence est essentielle dans la communication, car elle repose sur un langage précis, riche et adapté à chaque situation.
Pour cet exemple, l'enjeu n'est pas incroyable non plus, nos amis resteront nos amis, peu importe la qualité de la purée de petit pois.
Mais dans certains cas, ils peuvent avoir des conséquences terribles sur des victimes d'agressions sexuelles par exemple.
Je t'invite à écouter l'Interview vidéo de Caroline de Haas du collectif #NousToutes pour Brut sur l'importance du choix des mots.

Le choix des mots
Et pour toi, que se passe-t-il si tu choisis les mauvais mots lors d'un discours ?
Lors d'un pitch face à des investisseurs ?
Lors d'une réunion stratégique avec votre équipe ?
Lors d'une interview ultra médiatisée ?
La facilité consiste donc à choisir des mots passe-partout.
Mais siii, tu les utilises tous les jours ces mots.
Ils sont neutres, sans saveur, et on ne sait pas trop ce qu'ils veulent dire :
- "notre solution innovante"
- "la transformation digitale"
- "nos collaborateurs"
- "nos utilisateurs"
- "une approche complexe"
On peut même faire des phrases qui donnent l'air intelligent mais qui en vrai sont vides de sens. C’est là que l’art oratoire et une communication claire prennent tout leur intérêt :
"Via une approche complexe, nous mettons en place une transformation digitale avec nos collaborateurs en vue de créer la meilleure solution innovante pour nos utilisateurs"
Si tu veux rendre ça compréhensible, humain et intéressant, privilégie plutôt :
"On est 4 geeks et on travaille d'arrache-pied pour aider [insére le problème que tu résous de manière ultra-concrète]"
Pourquoi ça marchera mieux ?
Parce que chaque mot donne une couleur qui illumine cette prise de parole.
"4" = on sait combien vous êtes
"Geek" = des férus de nouveautés
"D'arrache-pied" = des passionnés
Il y a les mots doux, les mots bleus, les mots fléchés, les gros mots, les mots-de-tête, les jeux de mots, les mots de passe, et même les mots-passants... Ce Guy est partout décidément.
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Et il y a les mots-poisons.
Ce sont des expressions qui reflètent une perception limitée ou limitante d’une situation et qui peuvent avoir des conséquences sur la gestion de tes propres émotions et sur tes relations avec les autres.
Il est alors intéressant d’identifier ces mots-poisons et de les remplacer par des mots-antidotes.
Exemples annule et remplace :
- “Euh / Bon ben” → silence
- “Oui mais” → “Oui et”
- “Du coup” → “Ainsi / Donc / Dès lors / C’est pourquoi / Par conséquent…”
- “C’est clair que” → “Il est évident que / Cela va sans dire que…”
- “En fait” → “En réalité”
- “Après” (comme transition) → “Ensuite / Par la suite”
- “Réaliser” → “se rendre compte”
- “Débriefer” → “faire le bilan”
- “Manager” → “gérer / encadrer / accompagner”
- “Digital” → “numérique”
- “Challenger” → “mettre au défi”
- “Impacter” → “avoir un effet sur”
- “Faire sens” → “avoir du sens”
- “En termes de” → “en matière de”
- “Au jour d’aujourd’hui” → “aujourd’hui”
- “Comme par exemple” → “comme / par exemple”
- “Collaborer ensemble” → “collaborer / travailler ensemble”
Enrichis tes prises de parole.
Lis des styles différents.
Joue avec les mots.
Et surtout réfléchis à l'intention que tu aimerais véhiculer avec tes mots, car ils procurent des émotions.
Si je te dis "bienvenue dans votre nouveau cocon", l'état émotionnel dans lequel je te mets n'aura pas la même saveur que "bienvenue dans ta nouvelle maison".
Les mots ont un sens, une valeur, une couleur, un poids.
Qu’ils soient doux ou percutants, ils définissent l’éloquence, façonnent la rhétorique, et influencent profondément notre communication.
Dans l’expression orale, évite les phrases creuses ou les mots passe-partout.
Opte plutôt pour des mots concrets, évocateurs, qui ajoutent de la couleur à ton discours. Cela transformera ton langage impactant en un véritable atout.
Conclusion
Pour conclure en apothéose, voici un poème de Victor Hugo qui résume très bien l'importance des mots, et de l'impact qu'ils peuvent avoir.
En bien, comme en mal.
Braves gens, prenez garde aux choses que vous dites !
Tout peut sortir d’un mot qu’en passant vous perdîtes ;
Tout, la haine et le deuil !
Et ne m’objectez pas
Que vos amis sont sûrs
Et que vous parlez bas…
Écoutez bien ceci : Tête-à-tête, en pantoufle,
Portes closes, chez vous, sans un témoin qui souffle,
Vous dites à l’oreille du plus mystérieux
De vos amis de cœur ou si vous aimez mieux,
Vous murmurez tout seul, croyant presque vous taire,
Dans le fond d’une cave à trente pieds sous terre,
Un mot désagréable à quelque individu.
Ce mot, que vous croyez que l’on n’a pas entendu,
Que vous disiez si bas dans un lieu sourd et sombre,
Court à peine lâché, part, bondit, sort de l’ombre ;
Tenez, il est dehors ! Il connaît son chemin ;
Il marche, il a deux pieds, un bâton à la main,
De bons souliers ferrés, un passeport en règle ;
Au besoin, il prendrait des ailes, comme l’aigle !
Il vous échappe, il fuit, rien ne l’arrêtera ;
Il suit le quai, franchit la place, et cætera
Passe l’eau sans bateau dans la saison des crues,
Et va, tout à travers un dédale de rues,
Droit chez le citoyen dont vous avez parlé.
Il sait le numéro, l’étage ; il a la clé,
Il monte l’escalier, ouvre la porte, passe, entre, arrive
Et railleur, regardant l’homme en face dit :
« Me voilà ! Je sors de la bouche d’un tel. »
Et c’est fait. Vous avez un ennemi mortel.
Victor Hugo - Le mot
Julien de Sousa et toute l'équipe de Panache.
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Aller plus loin
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Une prise de parole impactante repose sur une préparation minutieuse et des mots choisis avec soin. Trop souvent, les discours échouent parce qu’ils sont remplis de clichés ou de phrases toutes faites, dépourvues de couleur et d’émotion.
En maîtrisant l’art de l’éloquence, tu peux apprendre à éviter ces erreurs et construire une communication efficace qui capte l’attention et touche ton public au cœur.
Les mots neutres ou "passe-partout" comme "solution innovante" ou "transformation digitale" manquent d’âme et d’impact. Pour enrichir ton discours, inspire-toi des principes rhétoriques d’Aristote, notamment le logos (la logique), le pathos (les émotions) et l’ethos (la crédibilité).
Enrichis ton vocabulaire en lisant des styles variés : romans classiques, paroles de rap, discours célèbres, essais ou même des articles journalistiques. Chaque style t’apportera une nouvelle palette de mots et des tournures originales.
Un bon discours repose sur des mots qui résonnent avec ton public et qui donnent vie à ton message.
Ne pas prêter attention au choix des mots peut ruiner un discours, même bien structuré. Les mots sont des leviers puissants qui influencent la perception de ton auditoire. Par exemple, une simple figure de rhétorique comme une métaphore peut transformer un message simple en une image marquante.
Les grands orateurs, qu’il s’agisse des penseurs du grec ancien ou d’un professeur de rhétorique, l’ont toujours su : l'art oratoire repose sur la justesse et la force des mots utilisés.
Pour rédiger un discours impactant, la première étape est de bien comprendre l’objectif de ton intervention.
Quel message veux-tu faire passer ?
À qui t’adresses-tu ?
C’est à partir de ces réponses que tu pourras définir la structure de ton discours.
L'organisation est primordiale : commence par une introduction captivante, pose clairement ton sujet et assure-toi de guider ton auditoire à travers ton raisonnement de manière fluide. La conclusion doit laisser une empreinte, un appel à l’action ou une réflexion qui marquera les esprits.
En ce qui concerne le choix des mots, privilégie des termes précis et percutants. Évite les mots génériques ou trop compliqués. Un efficace repose sur des mots simples qui véhiculent clairement ton message. haque mot doit avoir un impact et une intention.
N’oublie pas le rythme et l'intonation. Un discours trop rapide perdra ton auditoire, tandis qu’un discours trop lent risque de l’ennuyer. La pratique est indispensable pour ajuster ton timing et ton ton.
Enfin, un discours impactant ne se limite pas aux mots. Ton langage corporel et tes silences jouent également un rôle clé. Intègre la rhétorique de l'image ou des métaphores visuelles peut renforcer ton message.
Pour enrichir ton vocabulaire, je te conseille d’utiliser un dictionnaire comme le Petit Robert. Cet outil t’aidera à trouver des synonymes et à éviter les répétitions dans tes discours.
Tu peux aussi lire des discours classiques ou des ouvrages d'orateurs célèbres, c’est une excellente façon de découvrir de nouveaux mots et d'observer la structure de leurs interventions.
Pour structurer ton discours, je recommande des outils comme MindMeister pour organiser tes idées sous forme de carte mentale, ou Trello pour créer une organisation claire de ton contenu.
En termes de structure, une méthode simple mais efficace reste celle de l’introduction - développement - conclusion.
Si tu veux vraiment progresser, je te conseille de suivre une formation en prise de parole ou en rhétorique. Cela t’apportera des outils pratiques et te permettra d’affiner tes discours pour captiver ton auditoire.